Pour sauver la vie et l'amour: par amour donner sa vie!
Le martyre de Santa Scorese - II

Père Daniel Ange
[publié dans la révue "Spes Nostra", n.3 - 2001]

Premiers de cordée – Des yeux pour faire exister – Guidée par un père, entourée de frère
Comme Marie, livrer son coeur au Seigneur – "Assaillie par le doute, je te choisis à nouveau!"
Toujours prête à choisir DieuL’heure finaleCe cris du sang pour la gloire de Dieu

Toujours sur le qui-vive, prête à choisir Dieu!

Les trois dernières années de sa brève existence, cette épreuve intérieure va se doubler d'un chemin de croix extérieur, totalement inattendu. Au combat intérieur va s'ajouter une sorte d'état de guerre, qui la force à être constamment sur ses gardes, en état de qui-vive.

"Jusqu'à quel point je suis prête à tout quitter, mais vraiment tout pour Jésus? Donne-moi la force de mourir et de te faire vivre, Toi, Jésus" (Santa Scorese).

En effet, dès les premiers mois de 1988, elle est poursuivie par un psychopathe. Pendant trois ans, il la "file" partout, lui envoie des billets obscènes, lui téléphone sans arrêt, menace de tuer ses parents. Véritable harcèlement sexuel, comme celui qui bousille tant de jeunes aujourd'hui. Bref, il brûle d'une irrépréssible passion impure. Elle ne peut plus circuler seule et doit partir se faire accompagner, même pour rejoindre l'Université. Micro à Rosa-Maria, sa soeur : "Ce garçon était vraiment une présence étrange, il était omniprésent. Même quand nous sortions en voiture pour faire des achats, nous trouvions régulièrement un message de lui sur le pare-brise de l'auto".

Carmencita Picaro, une missionnaire de l'Immaculée, lui propose de partir continuer son cheminement vocationnel à Rome ou Bologne. Mais elle - pour des raisons qui nous échappent - sent qu'il lui faut rester sur place et ne pas fuir le danger. Fut-ce au prix d'une incessante vigilance, avec le stress que l'on devine. Le 6 février 1989, au jour même de ses 21 ans, elle subit une première agression sexuelle, tout proche de la Maison de l'Immaculée où elle partait pour une récollection.

Elle avoue: "Aujourd'hui, il a essayé de m'abuser violemment. Il m'a d'abord dit que je serai morte, ensuite il m'a jetée par terre, cherchant à m'embrasser. Quelle horrible sensation! Jai hurlé avec toute ma voix et toute mon âme, mais personne n'a entendu. J'ai invoqué Jésus, lui disant qu'il ne pouvait laisser faire cela, et j'ai appelé Marie. Heureusement, ils m'ont entendus et j'ai pu me libérer de ses griffes".

Traumatisée, elle se confie comme toujours à son Seigneur: "Je ne comprends pas pourquoi on est arrivé jusque là, pourquoi Jésus, permets-tu cela ? J'ai essayé de t'imaginer sur la croix, de contempler ta passion avec ma souffrance, mais je n'arrive pas: tu me demandes trop!
Comment puis-je continuer ma vie ainsi? Je sens que mes forces s'amenuisent. Mais, pourtant, je serais aveugle si je ne voyais pas que Tu étais là. Et toi, Marie, Mère, tu ne m'as même pas abandonnée un instant. Je te demande, l'esprit brisé, de me tenir dans ton coeur. Ne m'abandonne pas même un instant, car tu as pris l'engagement de m'accompagner toujours, jusqu'à l'éternité."

Début Mars 1991, d'après sa soeur, elle aurait reçu encore un billet, mais cette foi pour la prévenir de ce qu'il tramait. Elle le déchira. N'empêche que, perturbée, elle va se confier à son père spirituel (1): "Si quelque chose m'arrive, sachez que je choisis Dieu!". De son côté le curé de Palo del Colle affirmera: "Santa se préparait au pire et ce qu'elle m'a dit peu de jours avant l'agression me demeure gravé dans la mémoire: "S'il n'y a pas moyen de faire autrement, je veux dire à Dieu mon Oui. Je préfère mourir".

L'heure finale : celle de l'amour en son maximum

Et voici l'heure suprême. Nous sommes le 15 mars 1991. C'est Vendredi. Le soir. L'heure du coeur transpercé. Santa revient de la paroisse. Aux amis qui lui proposent de l'accompagner, elle répond qu'ayant sa voiture elle se sent en sécurité pour rentrer seule. La nuit est tombée. Et voilà que l'homme qui la poursuivait depuis trois ans est terré contre la porte de la maison. Ayant la complicité de l'obscurité et du silence, il espère être plus persuasif et pouvoir enfin assouvir sa folle passion.

Elle sonne à l'interphone. Le papa répond, mais il n'entend pas la voix de sa fille. Inquiet, il se précipité au balcon, se penche et surprend l'atroce scène. En hurlant, il se précipite par l'escalier et se jette sur l'assassin qui continue à frapper sa fille. Trop tard! Santa gît dans une mare de sang. Treize coups de couteaux ont déchiqueté son beau corps virginal.

Elle est immédiatement portée à l'hôpital. Sa soeur l'y accompagne: "Dans la voiture elle continuait de perdre son sang. Elle disait: "Aidez-moi! Je n'arrive pas à respirer!". Je lui suggère de se confier à la Madone. Elle me regarde. Elle murmure une prière à l'Immaculée qu'encore enfants nous avions composée ensemble: "Je t'offre tout mon être et toute ma vie, tout ce que je possède, tout ce que j'aime et tout ce que je suis: mon corps, mon coeur, mon âme".

Quelques heures plus tard. Tôt le matin du 16 mars, en salle d'opération l'Immaculée vient la prendre pour l'offrir à jamais à son Enfant, cet Enfant à qui elle était déjà totalement livrée.

N'avait-elle pas un jour écrit: "Jusqu'à quel point je suis prête à tout quitter, mais vraiment tout pour Jésus? Donne-moi la force de mourir et de te faire vivre, Toi, Jésus". Et de continuer: "Je te demande de me donner de te voir déjà sur la croix et à travers la croix de voir la résurrection. Que je sache, ô Marie, être prête à donner ma vie la plus intime pour Jésus, à souffrir pour Lui et avec Lui. Et à chanter toujours mon Magnificat, car le Seigneur a fait en moi de grandes choses Je te demande de me donner la capacité de mourir".

La voilà exaucée en plénitude. Et le Père Louis Faccenda d'écrire: "Oh! je la connaissais Santa et je l'admirais quand ses lettres respiraient la pureté, et qu'elle pensait consacrer toute sa vie au bien de ses frères, en rayonnant sa joie de vivre. Je la connaissais quand elle désirait percevoir en mon coeur les palpitations du Coeur de Jésus. Mon coeur pleure de tristesse, mais avec l'espérance qu'elle est là sur le trône des bienheureuses. Et elle nous appelle tous".

Comment ne pas évoquer ce mot fulgurant d'un évêque dominicain, tué trois ans plus tard à Oran, Pierre Claverie: "La mort ne pourra rien me prendre, car l'amour a déjà tout donné".

Jean-Paul II à la 3me Journée Mondiale de la Jeunesse: "Je suis venu saluer les martyrs du début du 3me millénaire". Le martyre de notre ardente petite Santa est-il prophétique pour cette mise sur orbite du troisième millénaire?

Ce cri du sang qui clame la Gloire de Dieu

Quelques mois plus tôt, le 20 aout 1989, un demi-million de jeunes de presque tous les pays du monde sont rassemblés à Compostelle (Espagne), sur le "Mont de la Joie". C'est la 3me Journée Mondiale de la Jeunesse (JMJ). Dès son arrivée, un journaliste pose à brûle-pourpoint la question à Jean-Paul II: "Qu'êtes-vous venu faire ici?" Réponse du tac au tac: "Je suis venu saluer les martyrs du début du 3me millénaire".

Avait-elle lu cette phrase-choc? Le martyre de notre ardente petite Santa est-il prophétique pour cette mise sur orbite du troisième millénaire?

Quelques mois plus tard, le 15 août 1991, deux millions de jeunes - pour la première fois de l'Est et de l'Ouest ensemble - sont rassemblés à Czestochowa. Le Pape tout de go lance à ceux d'Occident: "Soyez des lutteurs, comme ceux qui ont témoigné à l'Est jusqu'au martyre. La voici venue, votre heure!".

Pour clore, le micro à notre Prophète de Jean-Paul II, lors de la béatification de Marcel Callo, Pierina Morosini et Antonina Mesina: "Marcel, Pierina et Antonina, vous sont remis à vous, les jeunes, en tant que témoins d'un amour en marche, capable de voir au-delà de l'humain, de voir Dieu comme si on voyait l'invisible. Ils vous sont remis comme un exemple de foi mûrie, libre de tout compromis, comme un hymne d'espoir à l'adresse des nouvelles générations, que l'Esprit continue d'appeler aux sources de l'Evangile.
Aujourd'hui, ils sont placés dans un moment annonciateur pour annoncer la joie, celle de glorifier le Christ en son propre corps. En lui présentant la Parole de vie, ils crient leur message avec la force siliencieuse du martyre et, avec leur jeune sang, ils chantent au Christ, Roi et Seigneur des martyrs, aujourd'hui et toujours" (4 Octobre 1987).

Voilà donc ce que nous clame le martyre de cette humble et joyeuse jeune italienne, Santa Scorese, au seuil de ce nouveau siècle: celui où après le siècle le plus meurtrier de l'histoire, la vie éclatera dans son jaillissement printanier, parce que l'amour aura été restitué par l'Amour.

Note:
1. P.Tino Lucariello.

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Premiers de cordée – Des yeux pour faire exister – Guidée par un père, entourée de frère
Comme Marie, livrer son coeur au Seigneur – "Assaillie par le doute, je te choisis à nouveau!"
Toujours prête à choisir DieuL’heure finaleCe cris du sang pour la gloire de Dieu

E-mail: gesunuovo@yahoo.it

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